Isabelle FILLON : Double vie avec le Handicap

Textes et dessins d'expression pour vous faire voir que malgré le handicap et les difficultés pour parler notre tête pense....

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Le Progrès 12/07/2003

A quatre ans, Isabelle a contracté la rougeole. Maladie bénigne pour la plupart des enfants, elle a été un calvaire pour la petite fille qui est tombée dans le coma, torturée par une encéphalite. Les années ont passé, isolant l'enfant, puis l'adolescente et la femme dans un monde sans parole. C'est par l'Australie que le miracle est arrivé sous la forme d'une méthode permettant enfin de communiquer à l'aide d'un ordinateur et d'une tierce personne par laquelle les mots arrivent. Mais Isabelle est avant tout une artiste qui expose et qui conjugue art et amour.

«Je crois rêver en voyant tout ce monde venu pour moi, non pas parce que je suis handicapée mais parce qu'ils aiment ce que je fais»,  murmure Isabelle. Tout est dit même si dire n'est peut-être pas le bon mot à employer. Parce qu'Isabelle, murée dans son silence des lèvres, communique avec ce que l'on a de plus précieux, le coeur et l'âme.
Comment, direz-vous ? D'abord par sa peinture, grandes tâches de couleurs significatives, qui racontent toutes quelque chose. Et ces dessins et peintures s'accompagnent de textes philosophiques où elle exprime ce qu'elle ressent. Il y a là le vert de l'espoir qui raconte le rayonnement de la nature ou encore le rouge de la chaleur des autres, de la vie partagée. Le soleil joue dans l'herbe et le rose, c'est l'âme qui se dégage de toute cette sérénité. Isabelle vit sa vie en rose et vert communicant sa joie de vivre qui recommence. Elle parle avec les couleurs de l'amour, parsemant son pinceau d'une myriade d'énergies qui rayonnent tout autour d'elle. Pas besoin de mots juste entrer...
L'année 2003 est l'année du handicap. S'il fallait une seule raison pour aller à la Maison de Pays jusqu'au 20 juillet, ce serait celle-là. Mais si vous recherchez une tornade de pensées qui scintillent, une comète de l'espoir ou tout simplement croire en une vie plus belle pour peu qu'on la regarde avec des yeux qui savent voir, n'hésitez pas. Les messages d'Isabelle vous transporteront du côté de la vie qui se crée parsemée d'étincelles d'amour.
Nadine Peronnet

La Communication facilitée
Si Isabelle Fillon tient le pinceau seule, il n'en est pas de même pour écrire. Elle a besoin, pour s'exprimer, de quelqu'un - le facilitant - à qui elle désigne du doigt des objets, des images ou des mots écrits et qui vont s'exprimer dans un langage structuré en tapant avec un doigt à la machine. Le partenaire soutient la main du patient qui peut ainsi exprimer ses désirs, ses sentiments et émotions. C'est en Australie, dans les années 70-80, qu'a été développée cette méthode révolutionnaire puis relayée en France par une orthophoniste, voilà dix ans. Utilisée principalement dans la psychophanie, la Communication Facilitée (CF) ou TMPP (Ta main pour parler) est un moyen de faire sortir du silence de multiples handicapés, autistes, traumatisés ou atteints de problèmes de communication. La Communication Facilitée modifie le regard que l'on porte sur ces personnes qui s'épanouissent et progressent lorsqu'elles arrivent à s'exprimer. Leur attention est plus soutenue, elles manifestent une plus grande joie de vivre, cherchent davantage à communiquer. La méthode révèle que la personne déficiente mentale, quel que soit son handicap, possède une conscience intelligente. Ses difficultés résident surtout dans la restitution des informations, l'application des connaissances et l'adaptation à l'environnement. La CF lui permet d'exprimer une richesse intérieure qu'on était quelquefois à mille lieues de soupçonner. Pour s'en convaincre, il suffit de capturer le regard d'Isabelle communiquant avec sa soeur Brigitte qui lui tenant le doigt. Les mots arrivent en rafales, les sourires disant « tu as compris ce que je voulais dire ». Certains pourraient croire à la supercherie, à la magie. Comment, une personne qui n'a jamais appris à lire et à écrire, à parler même, peut-elle restituer des textes si profonds et si chaleureux sans que le «facilitant» véritable antenne réceptrice-émettrice, n'écrive à sa place?
 Brigitte l'explique très bien et n'est pas en symbiose qu'avec sa soeur mais aussi avec d'autres personnes de l'Institut où Isabelle est placée. Il faut de la patience, ne pas écrire les mots avant qu'on ne les ait « sentis », «entendus». Ainsi, avec sa maman, Isabelle n'arrive pas à communiquer, Solange voudrait parler pour elle.  C'est tout un apprentissage d'amour à faire pour sentir soi-même le mouvement de la main du patient qui tire vers les touches de la machine. Mais quand on y arrive, c'est une large porte ouverte aux émotions que l'on offre aux handicapés.

Pour en savoir plus : www.tmpp.net